Questions
1.
Quand débuter le sevrage de la ventilation mécanique ?
2.
Peut-on prévoir qu’un sevrage de la ventilation mécanique sera
difficile ?
3.
Comment conduire le sevrage de la ventilation mécanique ?
4.
Quelles sont les particularités du sevrage de la ventilation mécanique
selon le terrain ?
5.
Quelles sont les possibilités en cas d’échec du sevrage de la
ventilation mécanique ?
Introduction
La ventilation mécanique (VM) est associée à la survenue de
complications dont l’incidence est d’autant plus grande que la durée
de l’intubation est plus longue. La procédure de sevrage vise à réduire
la durée de la VM tout en tolérant un pourcentage acceptable d’échecs.
Cette procédure comporte trois étapes :
• le prérequis à l’épreuve de ventilation spontanée (VS),
• l’épreuve de VS,
• la période de 48 heures au terme de laquelle le sevrage est considéré
comme réussi ou non.
La définition retenue par le jury pour le sevrage, est la procédure décrite
ci-dessus aboutissant à l’interruption de la VM pendant 48 heures. Ce
sevrage réussi s’accompagne habituellement de l’extubation.
1. Quand débuter le
sevrage de la ventilation mécanique ?
1. L’opportunité d’interrompre la VM doit être recherchée
dès son instauration, indépendamment de la pathologie sous-jacente [2].
2. La procédure de sevrage débute par la recherche du prérequis à l’épreuve
de VS. Il comporte des critères généraux et respiratoires. Leur
recherche effectuée, en règle générale, par le personnel infirmier
et/ou les kinésithérapeutes, doit être précoce [c,3], quotidienne
[c,3] et faire l’objet d’un protocole rédigé [a,1].
3. Les critères généraux sont l’absence de vasopresseur et d’inotrope,
l’absence de sédation et une réponse cohérente aux ordres simples
[3].
4. Les critères respiratoires sont une valeur de FIO2 &Mac178; 50 %,
et un niveau de PEP &Mac178; 5 cm H2O [c,3].
5. Le médecin peut s’affranchir d’un ou plusieurs de ces critères généraux
ou respiratoires pour décider de l’épreuve de VS [3].
6. L’utilisation systématique des paramètres de mécanique
ventilatoire et des indices dérivés (pressions, résistance, compliance,
commande ventilatoire) n’est pas recommandée [b,2].
7. Le sevrage est réussi dès la première tentative chez les 2/3 environ
des patients sélectionnés sur ces critères. Le pourcentage d’échecs
qui en découle est considéré comme acceptable en regard des risques
d’une VM prolongée inutilement [3].
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2. Peut-on prévoir
qu’un sevrage de la ventilation mécanique sera difficile ?
8. Le sevrage de la VM est le plus souvent facile [a].
9. Le sevrage difficile est défini par l'échec de la première épreuve
de VS, ou la reprise de la ventilation dans les 48 heures suivant son arrêt
programmé [3].
10. Individualiser les patients à risque de sevrage difficile est
important car la ré-intubation est un facteur de surmortalité [b,2].
11. Les critères prédictifs d'un sevrage difficile sont distincts de
ceux prédisant l'échec du retrait de la prothèse endotrachéale [2].
12. Les facteurs de risque généraux d'un sevrage difficile sont : la durée
de la VM [b], un score de gravité élevé [b], l'existence d'une BPCO
[b], d'une pathologie neuromusculaire [c], et à un moindre degré d’une
insuffisance cardiaque gauche, d'une coronaropathie ou d’une anxiété
importante [c].
13. Parmi les indices physiologiques utilisés pour prévoir l’issue de
l’épreuve de VS, le rapport fréquence respiratoire sur volume courant
(f/VT) est le plus souvent proposé mais son utilisation routinière ne
peut être recommandée [b,3].
14. Les autres indices sont insuffisamment spécifiques ou sensibles pour
être recommandés en routine [b,3].
15. Les facteurs de risque d’échec de l' extubation sont : la toux
inefficace, l’encombrement et la suspicion d’œdème laryngé [2].
16. La présence de ces facteurs de risque ne doit pas retarder la procédure
de sevrage, mais impose une vigilance accrue si l’extubation est décidée
[3].
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3. Comment conduire le
sevrage de la ventilation mécanique ?
17. La mise en place d’un protocole de sevrage réduit la durée
et les complications de la VM [a,1].
18. La recherche du pré requis à l’épreuve de VS doit être systématique
et quotidienne [a,1].
19. Dans le cadre d’un protocole, cette recherche est efficacement réalisée
par le personnel infirmier et/ou les kinésithérapeutes [a,1].
20. L’élaboration de ce protocole, obligatoirement écrit, doit prendre
en compte la réflexion de toute l’équipe soignante [3].
21. L’adhésion de l’équipe soignante au protocole implique une
diffusion large de ses objectifs, de ses modalités et de ses résultats
à l’occasion de réunions régulières [3].
22. La présence du pré requis à l’épreuve de VS impose la réalisation
sans délai, par le personnel infirmier et/ou les kinésithérapeutes,
d’une épreuve de VS [2].
23. Le patient, installé de façon confortable en position semi-assise
doit être informé, rassuré et encouragé. Une aspiration trachéo-bronchique
doit être réalisée au préalable [3].
24. L’épreuve de VS peut être menée indifféremment sur une pièce en
T ou en utilisant un faible niveau d’aide inspiratoire (AI) de l’ordre
de 7 cm H2O [a,1].
25. L’utilisation d’un filtre échangeur de chaleur et d’humidité
accroît l’espace mort instrumental et nécessite d’augmenter le
niveau d’AI [b,2].
26. Il n’est pas recommandé d’adjoindre une pression expiratoire
positive lors de l’épreuve de VS [3].
27. Le choix de la modalité de l’épreuve de VS est fonction des
habitudes de l’unité [3].
28. La durée de cette épreuve de VS est comprise entre 30 et 120 minutes
[1].
29. Lorsqu’un sevrage facile est prévisible, la durée de l’épreuve
de VS peut être raccourcie sur décision médicale [3].
30. La surveillance repose sur l’évaluation de l’état clinique et
sur le monitorage continu de la fréquence respiratoire, de la fréquence
cardiaque, de la pression artérielle et de l’oxymétrie de pouls [3].
31. L’apparition de critères de mauvaise tolérance (fréquence
respiratoire > 35 cycles/mn, oxymétrie de pouls < 90 %, variation
de plus de 20 % de la fréquence cardiaque ou de la pression artérielle
systolique, sueurs, troubles de la vigilance, agitation) impose de vérifier
la perméabilité de la sonde d’intubation et d’interrompre l’épreuve
de VS après avoir prélevé des gaz du sang [b,3].
32. En l’absence de signe de mauvaise tolérance, la pratique de gaz du
sang n’est pas systématique [3].
33. En cas de succès de l’épreuve de VS, les facteurs de risque d’échec
de l’extubation doivent être recherchés [3].
34. En leur absence et après aspiration gastrique, le patient doit être
extubé après prescription écrite du médecin [3].
35. Chez l’adulte, il n’existe pas d’argument justifiant
l’administration d’une corticothérapie pour prévenir l’œdème
laryngé [a,1].
36. En cas d’échec de l’épreuve de VS, les facteurs suivants doivent
être recherchés : obstruction de la sonde d’intubation, encombrement
de l’arbre trachéo-bronchique, insuffisance ventriculaire gauche, ischémie
myocardique, neuromyopathies de réanimation, sepsis, anémie, dysfonction
diaphragmatique, bronchospasme, désordres métaboliques et nutritionnels
[3].
37. La Ventilation Assistée Contrôlée Intermittente ne doit pas être
utilisée au cours de la procédure de sevrage [a,1].
38. Deux modalités d’assistance ventilatoire sont possibles : d’une
part, l’AI dégressive et optimisée (sensibilité du déclenchement
inspiratoire, réglage de la pente du débit inspiratoire, cyclage
inspiration/expiration) ; et d’autre part, la ventilation volumétrique
assistée contrôlée encadrant des périodes répétées de VS
aboutissant à l’extubation lorsqu’elles sont bien tolérées pendant
30 à 120 minutes [b,2].
39. Lors de la procédure de sevrage l’épreuve de VS doit être impérativement
réalisée quotidiennement [a,1].
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4. Quelles sont les
particularités du sevrage de la ventilation mécanique selon le terrain ?
40. Quel que soit le terrain, le déroulement de la procédure
de sevrage est identique et doit débuter le plus tôt possible [c,2].
41. En cas de BPCO les critères de tolérance de l’épreuve de VS ne
sont pas différents, à l’exception du seuil de SaO2 (&Mac178; 88
%) [c,3].
42. Chez ces malades, le risque plus élevé de sevrage difficile conduit
à recommander une épreuve de VS d’une durée de 120 min [c,3].
43. En cas d’échec de l’épreuve de VS, la VM est reprise en
utilisant l’AI avec PEP et en administrant des broncho-dilatateurs en
cas de bronchospasme [b,2].
44. L’optimisation des modalités de ventilation vise à supprimer les
efforts inspiratoires inefficaces [b,2].
45. En cas de BPCO, la VNI peut être proposée en cas d’échec de l’extubation
[b,2]. Cette approche nécessite un personnel suffisant et entraîné au
sein d’un centre expérimenté [3].
46. La VNI après une extubation délibérée réalisée malgré l’échec
de l’épreuve de VS ne peut être actuellement recommandée [3].
47. Les patients atteints de BPCO en situation de sevrage difficile
peuvent être pris en charge dans des unités spécialisées hors réanimation
[c,2].
48. En cas de sevrage difficile chez un malade suspect de cardiopathie,
l’état cardiaque doit être évalué et le traitement adapté [3].
49. L’utilisation de diurétiques et de vasodilatateurs est préférable
à celle des inotropes [c,3].
50. Dans les pathologies cérébrales, le sevrage ne se conçoit qu'en
l’absence d'hypertension intracrânienne [2]. Les chances de succès
augmentent avec le score de Glasgow [b].
51. L’évaluation du risque d’échec lié à l’encombrement (toux
inefficace, troubles de la déglutition) est capitale [2]. Ce risque suggère
un recours plus fréquent à la trachéotomie [b,2].
52. Dans les maladies neuromusculaires en voie d’amélioration et plus
particulièrement au cours de la polyradiculonévrite aiguë les mesures répétées
de la capacité vitale (> 8-10 ml/kg), de la PImax (< -20 cm H2O) et
de la PImax (> 40 cm H2O) peuvent aider au sevrage [c,3].
53. Chez ces patients, l’épreuve de VS sera prolongée au delà de 120
minutes. Une durée d’au moins 12 heures peut être proposée [b,3].
54. Durant l’épreuve de VS chez les malades neuromusculaires,
l’hypercapnie (> 45 mm Hg) est un signe de gravité majeure. Toute
baisse de la saturation artérielle en oxygène, témoigne d’une
hypoventilation grave [2].
55. Le sevrage difficile et le pronostic à moyen et long terme de la
maladie posent la question du recours à la VNI ou à la trachéotomie,
qui seront discutées au cas par cas [3].
56. La procédure de sevrage des patients chirurgicaux intègre la prise
en charge de la douleur [b,2].
57. La procédure de sevrage chez l’enfant n’est pas différente de
celle utilisée chez l’adulte [c,2]. Les différents indices prédictifs
de la difficulté du sevrage ne sont pas plus discriminants chez
l’enfant que chez l’adulte [b].
58. Les complications laryngées sont plus fréquentes chez l’enfant et
pourraient être prévenues par l’administration de corticoïdes 6 à 12
heures avant l’extubation [b].
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5. Quelles sont les
possibilités en cas d’échec du sevrage de la ventilation mécanique ?
59. L’échec du sevrage de la ventilation est défini par la
persistance d’une dépendance ventilatoire partielle ou totale malgré
une procédure de sevrage conduite de manière répétée depuis 30 jours
[3].
60. En cas d’échec du sevrage de la ventilation endotrachéale, la VNI
et la trachéotomie peuvent être proposées [b,2].
61. La VNI est contre-indiquée en cas de troubles majeurs de la
conscience ou de troubles de la déglutition [b,2].
62. La trachéotomie diminue le travail respiratoire [b], facilite la
toilette bronchique et améliore le confort du patient. Aucun critère ne
définit le moment optimal de sa réalisation [3].
63. Hors réanimation, la prise en charge associe la poursuite de la procédure
de sevrage et la réhabilitation [b,2].
64. Elle s’effectue dans des unités de soins intermédiaires
respiratoires ou des structures de soins de suite spécialisées [2].
65. Le retour à domicile n’est envisageable qu’avec l’aide de
professionnels entraînés, impose une infrastructure spécifique et fait
peser des contraintes importantes sur la famille [b2].
66. Il convient de se poser la question de la poursuite des soins au cours
des situations suivantes : lorsque le recours à la VNI ou à la trachéotomie
apparaît comme une obstination déraisonnable et lorsque la procédure de
sevrage et/ou la poursuite des soins sont refusées par le patient sans
toutefois négliger l’avis de la famille [3].
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