PRÉVENTION DE LA DIFFUSION DES BACTÉRIES MULTIRÉSISTANTES

C.H.R.A

PRÉVENTION DES BACTÉRIES MULTIRÉSISTANTES EN EN RÉANIMATION

Date de diffusion : juin 1998
Version : 01

Rédigé par : Ch. Santré
Vérifié par : 
Ch. Santré
Validé par :
CLIN 1998

Version PDF 111 Ko

 "L'isolement géographique et technique des patients colonisés ou infectés à BMR constitue la principale mesure visant à interrompre la dissémination de ces germes aux malades et au personnel " ... "Tous les malades hospitalisés en réanimation doivent bénéficier d'un " isolement technique standard ". Cette mesure fondamentale doit être appliquée dans tous les cas, quels que soient la structure architecturale, les moyens matériels à disposition et le type de patient (colonisés/infecté ou non). " 

Indications du dépistage
Isolements spécifiques
Indications et procédures de chimiodécontamination
CAT. en cas d'épidémie

 

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I - STRATÉGIE DE DÉPISTAGE.

I - 1 Dépistage bactériologique.

Il est réalisé dès l’admission pour les patients suivants :

Patients provenant d’un autre service ou d’un autre établissement,
Patients ayant été hospitalisés récemment (dans l’année précédente),
Patients antérieurement connus comme porteurs de BMR (Cf. dossier médical),

Outre les prélèvements cliniques habituels (ECBT, AET, brosse, LBA, etc.), les prélèvements de dépistage à réaliser sont les suivants :

Écouvillonnage du nez et du périnée pour les SARM,
Écouvillonnage rectal pour les EBLSE.

 Ces prélèvements sont répétés de façon hebdomadaire.
 Pour le Laboratoire, indiquer "Dépistage BMR " et préciser le site de prélèvement.
 Pour le site nasal, un seul écouvillon suffit pour les 2 narines
 Le dépistage permet d'identifier les patients colonisés : ceci permet d'assurer la mise en œuvre des mesures d'isolement spécifiques, d'augmenter la sensibilité de la détection, de motiver l'équipe soignante et d'orienter le choix de l'antibiothérapie en cas d'infection.

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  I - II Définition des bactéries multirésistantes.

 

" Une bactérie multirésistante (BMR) est définie comme une bactérie qui n'est sensible qu'à un petit nombre de familles ou de sous-familles d'antibiotiques. Cette sensibilité réduite peut être le fait de résistances naturelles ou acquises. L'acquisition d'un phénotype de résistance peut résulter de la sélection d'un mutant résistant ou de l'acquisition de gènes de résistance. "

 
 Les principales BMR actuellement, ou potentiellement, responsables d'infections acquises en réanimation sont indiquées dans le tableau suivant (écologie propre au C.H.R.A.) :
 

 

Phénotype de résistance principal

Fréquence  C.H.R.A.

Potentiel épidémique 

 Résistance naturelle

 

 

 

S. maltophilia, B. cepacia

  C 3 G, Carbapénèmes

+/-

+/-

 Résistance acquise 

 

 

 

Cocci Gram positif

 

 

 

 S. aureus

Méticilline et toutes les béta-lactamines (associé à la résistance aux aminosides et aux fluoro-quinolones)

 +++

 +++

 Entérocoques

Résistance aux glycopeptides

 +/- 

++

 Bacilles à Gram négatif

 

 

 

Entérobactéries

 

 

 

K. pneumoniae, Enterobacter sp., E. coli, P. mirabilis

BLSE : toutes les béta-lactamines sauf les céphamycines et les carbapénèmes

+/-

+++

Enterobacter sp, Serratia sp., M. morganii

Céphalosporinase hyperproduites : toutes les béta-lactamines sauf le céfépime, le cefpirome et les carbapénèmes 

++

++

P.  aeruginosa

Ceftazidime, cefsulodine

+++

+

 

Imipénème (imperméabilité sélective)

+++

+

Acinetobacter sp

Imipénème, C 3 G, Ticarcilline ou aminosides

-

++

  
Le phénotype de résistance est indiqué par le Laboratoire de Microbiologie.

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II - STRATÉGIE DE PRÉVENTION - ISOLEMENTS SPÉCIFIQUES.

II - 1 Indications de mise en place d’isolement spécifique.

1. Patients présentant des facteurs de risque de colonisation à BMR :

Hospitalisations multiples,
Hospitalisation dans un autre service supérieure à 7 jours,
Hospitalisation dans le service supérieure à 7 jours, antibiothérapie antérieure et suspicion d’infection acquise dans le service.

2. Patients antérieurement connus comme porteurs de BMR,
3. Patients provenant d’un établissement supérieur à 500 lits,
4. Patients provenant d’un établissement de moyen ou long séjour,
5. Patients identifiés comme porteurs de BMR (pour la définition Cf. Tableau).

Dans les cas 1 à 4, l’isolement spécifique est levé si les prélèvements de dépistage sont négatifs. Dans le cas 5, l’isolement sera levé sur prescription médicale (négativation des prélèvements, risque de dissémination considéré comme négligeable).
Le risque de dissémination peut être considéré comme négligeable, lorsque le patient a été extubé (en cas de colonisation pulmonaire persistante) ou lorsque les cathéters sont ôtés pour les sites de colonisation concernés.

II - 2 Bactéries multirésistantes justifiant un isolement spécifique.

Les BMR justifiant un isolement spécifique sont les suivantes :

Staphylocoques dorés résistant à la méticilline (SARM)
P. aeruginosa présentant au moins deux mécanismes de résistance (céphalosporinase hyperproduite, imperméabilité à l’imipénème, BLSE, résistance aux aminosides, à la ciprofloxacine),
Entérobactéries productrices de BLSE, de céphalosporinases hyperproduites.
Stenotrophomonas maltophilia multirésistants,
Acinetobacter sp multirésistants.
Entérocoques résistants aux glycopeptides.

Cette liste est établie en fonction des bactéries actuellement isolées au C.H.R.A. et est susceptible d’être modifiée. Dans ce cas, un message "   ATTENTION BACTÉRIE MULTIRÉSISTANTE  Isolement nécessaire " accompagne l’édition par le Laboratoire de Microbiologie.

II - 3 Signalisation des malades porteurs de BMR.

" Une signalisation des malades porteurs de BMR  doit être mise en route. Elle doit être reconnue par l'ensemble des personnels et doit être respectueuse du patient. Elle doit figurer sur la porte de la chambre, le dossier infirmier, le dossier médical lors du transport dans l'hôpital, la feuille de liaison et le compte rendu lors du transfert vers une autre unité ou un autre établissement. La signalisation des patients colonisés par des BMR et l'information de l'ensemble des personnels hospitaliers permettent d'assurer la continuité des mesures d'isolement et contribuent à limiter la dissémination de ces germes. "

Lors de la mise en place des mesures d’isolement spécifique, la signalisation doit figurer sur la porte de la chambre (affiche), sur le dossier infirmier, le dossier médical lors du transport dans l’hôpital, la feuille de liaison lors du transfert vers un autre service (étiquettes à coller dans le dossier de soins et sur les demandes d’examen).
Les affiches et les étiquettes sont disponibles dans le service et dépendent du type d’isolement ("Contact", "Gouttelettes" ou "Aéroporté").
Une plaquette d’information du patient ou de son entourage sera également disponible.

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II - 4 Indications de chimiodécontamination.

"  L'intérêt de la chimiodécontamination (CD) antibiotique des réservoirs humains dans une stratégie de maîtrise des infections hospitalières à BMR demeure mal précisé. En l'état actuel des connaissances, la CD n'est qu'un complément limité dans le temps et elle ne saurait se substituer, en particulier, au renforcement des mesures d'isolement technique et géographique, ni à l'optimisation du ratio personnel-patient. "

 
1. EBLSE : En cas d’épidémie dans le service, une décontamination digestive par l’association de deux ou trois des produits suivants peut être proposée : aminoglycosides, polymyxine B, érythromycine base.

2. SARM : la CD nasale doit être associée à une décontamination cutanée au moyen d’antiseptiques (polyvidone iodée, chlorhexidine).
En cas d’épidémie non contrôlée par les mesures barrières, la CD des patients porteurs selon le schéma suivant peut être proposée :

Mupirocine nasale (solution à 2 p. 100 - applications biquotidiennes pendant 5 jours),
Toilette corporelle totale à la chlorhexidine ou à la polyvidone iodée pendant 3 jours.

Attention une utilisation prolongée de mupirocine expose à une résistance secondaire à ce produit.

3. Pour les autres BMR : aucune indication de décontamination actuellement.

Le contrôle d'efficacité de la chimiodécontamination est établi par :

Pour les EBLSE : 3 écouvillons rectaux successifs négatifs,
Pour les SARM : deux prélèvements négatifs, 48 heures et une semaine après la fin de la décontamination.

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II - 4 Conduite en cas d’épidémie.

En cas d'épidémie, les sources, les réservoirs secondaires, ainsi que les voies de transmission doivent être identifiés par des prélèvements complémentaires. On doit alors rechercher le SARM et les EBLSE. Tous les malades doivent être prélevés. Ces prélèvements doivent inclure l'environnement en cas d'épidémie à S. maltophilia, B. cepacia, Acinetobacter sp ou P. aeruginosa, et le personnel en cas d'épidémie à SARM.
Il est hautement souhaitable que le typage moléculaire de la/des souches concernées soit entrepris. Les mesures d'isolement spécifique et géographique doivent être généralisées. La chimiodécontamination des sites de portage usuels est justifiée dans l'épidémie débutante, où elle trouve son maximum d'efficacité. En cas de non maîtrise d'une épidémie, des mesures de cohortage du personnel peu-vent être proposées. Enfin, une décontamination du personnel colonisé par SARM devra être mise en route. La présence de lésions contaminantes au niveau des mains justifie l'éloignement temporaire du soignant jusqu'à stérilisation des lésions. Dans les cas extrêmes, le service sera fermé et désinfecté. A la sortie de la réanimation, le patient encore colonisé par des BMR doit faire l'objet d'une signalisation systématique.

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RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES.

1. Révisions des recommandations du C.D.C Am J Inf Control 1996 ; 24 : 24-52.
2. Prévention des infections à bactéries multirésistantes en réanimation. XVIe Conférence de consensus en réanimation. Réanimation Urgences 1997 ; 1 :
3. Recommandations d’isolement septique à l’hôpital (C.T.I.N.). HygieneS 1996 ; Hors série n° deg;1.

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ANNEXE.

BMR

Antibiotiques concernés

Staphylocoques dorés résistant à la méticilline (SARM)  
P. aeruginosa présentant au moins deux mécanismes de résistance Ceftazidime, cefsulodine 
Imipénème (imperméabilité sélective) 
céphalosporinase hyperproduite, imperméabilité à l’imipénème, BLSE, résistance aux aminosides, à la ciprofloxacine),
Entérobactéries productrices de BLSE, de céphalosporinases hyperproduites BLSE : toutes les béta-lactamines sauf les céphamycines et les carbapénèmes 
 Céphalosporinase hyperproduites : toutes les béta-lactamines sauf le céfépime, le cefpirome et les carbapénème
Stenotrophomonas maltophilia multirésistants Imipénème, C 3 G, Ticarcilline ou aminosides
Acinetobacter sp multirésistants Idem

Cette liste est établie en fonction des bactéries actuellement isolées au C.H.R.A. et est susceptible d’être modifiée. Dans ce cas, un message "ATTENTION BACTÉRIE MULTIRÉSISTANTE  Isolement nécessaire" accompagne l’édition par le Laboratoire de Microbiologie.

PRÉLÈVEMENTS DE DÉPISTAGE.

A réaliser lors de l’admission pour les patients à risque (Cf. facteurs de risque). Un isolement préventif est mis en place dans l’attente des résultats bactériologiques (environ 48 heures)
A renouveler tous les 8 jours pour les patients restant dans le service (à programmer sur la feuille de biologie et feuille mensuelle).

MODALITÉS PRATIQUES.

Pour la recherche de SARM, écouvillonner les fosses nasales et les plis inguinaux (un seul écouvillon pour les deux côtés)
Pour la recherche de BMR entériques (EBLSE, P. aeruginosa multirésistant), écouvillonnage rectal ou prélèvements de selles.
Sur la demande d’examen pour le Laboratoire, noter "dépistage BMR" et le site d’écouvillonnage.

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