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I RAPPEL D'ANATOMIE FONCTIONNELLE ET DE PHYSIOLOGIE
Le foie est la plus volumineuse glande du corps humain. Organe richement
vascularisé, 25 % du débit cardiaque étant dévolu au foie.
L'apport sanguin arrive au foie par le hile hépatique et provient aux 2/3 de la veine
porte (sang en provenance du territoire intestinal, riche en nutriments et pauvre en O2),
le 1/3 restant étant apporté par l'artère hépatique.
Les voies biliaires drainent la sécrétion biliaire hépatique vers le duodénum.
Au sein de l'unité fonctionnelle hépatique, le sang et la bile circulent à
contre-courant, permettant ainsi aux hépatocytes de modifier en permanence la composition
de ces deux milieux, dans le but de contrôler la concentration des solutés :
è délivrés vers la circulation générale par les veinules hépatiques (= fonction
endocrine)
è éliminés dans la bile par les canalicules bilaires (= fonction exocrine).
Les différentes fonctions du foie
Stockage et livraison des nutriments :
Rôle dans le métabolisme glucidique :
Stocke les glucides sous forme de glycogène
Synthétise du glucose à partir d'acides aminés : néoglycogénèse
Rôle dans le métabolisme des protides :
Synthèse des protéines plasmatiques : albumine + facteurs de coagulation = fibrinogène,
prothrombine (II, V, VII, IX, X), anti-thrombine III, protéines C et S
NB : En cas de diminution du TP, la mesure de facteurs de coagulation permet de
différencier une carence en vitamine K (= diminution des facteurs vitamines K-dépendants
: II, VII, IX et X mais normalité du facteur V, seul facteur du complexe prothrombine
dont la synthèse ne dépend pas de la vitamine K), d'une insuffisance hépato-cellulaire
vraie (diminution de tous les facteurs, y compris du facteur V).
Rôle dans le métabolisme des lipides :
Synthèse et élimination du cholestérol (éliminé de l'organisme dans la bile :
synthèse acides biliaires, sécrétion directe de cholestérol libre dans la bile)
Métabolisme des triglycérides et phospholipides
Stockage et transformation des vitamines liposolubles.
Traitement des déchets organiques
1. Dégradation de l'ammoniaque
Hépatocytes périportaux captent NH4+ à urée
Hépatocytes péri-hépatiques transforment NH4+ à glutamine
Métabolisme de la bilirubine (= produit de dégradation de l'hème)
Métabolisme des xénobiotiques : les toxines et les médicaments. doivent être
éliminés de l'organisme pour prévenir leur accumulation toxique. La plupart des
xénobiotiques hydrosolubles sont éliminés par le rein. Les substances liposolubles
doivent être rendues hydrosolubles pour permettre leur élimination. Ces modifications
sont réalisées de façon prédominante par le foie.
Production des acides biliaires
Synthèse à partir du cholestérol, élimination dans la bile et captation des acides
biliaires présents dans la circulation sanguine après leur réabsorption intestinale.
Bile = sécrétion exocrine du foie.
Défense anti-infectieuse : filtre anti-infectieux
Les cellules de Kupffer : macrophages anti-bactériennes et destruction des endotoxines
II EXPLORATION BIOLOGIQUE DES FONCTIONS HEPATIQUES
CYTOLYSE = ASAT, ALAT = TGO, TGP = témoin de nécrose hépatocytaire.
CHOLESTASE = PA, GGT, 5'Nu, acides biliaires (si augmentation isolée, obstacle
écoulement bile), bilirubine (augmentation dans cholestase)
SYNTHESE HEPATIQUE : albumine, bilirubine, urée, cholestérol, glycémie TP, Facteur V,
ammoniaque, acide lactique.
TESTS METABOLIQUES : galactose, , aminopyrine, lidocaïne,
.. = administration d'un
substrat dont métabolisme est hépatique ==> temps pour éliminer ce substrat.
INSUFFISANCE HEPATO-CELLULAIRE AIGUE
I DEFINITION
Survenue d'une maladie hépatique aigue et sévère avec encéphalopathie
hépatique chez une personne avec un foie antérieurement sain. Des troubles de
coagulation sont associés.
II ETIOLOGIES
Virus :
A : Contamination féco-orale
B : Contamination sexuelle et voie parentérale (toxicomanie IV)
Transmission mère-enfant pour les pays en voie de développement
C : Contamination voie sanguine (patient ayant reçu du sang et dérivés de sang avant
mars 90) et toxicomanie IV
D : toxicomanie IV
E : Contamination féco-orale, limitée à certains pays
Autres : Herpès 1, 2 et 6, adénovirus, Epstein Barr, CMV
Médicaments :
La plupart des médicaments sont métabolisés par le foie, les médicaments, le plus
souvent liposolubles, sont transformés par les hépatocytes en métabolites
hydrosolubles, éliminés dans la bile ou dans les urines.
De très nombreux médicaments peuvent être hépatotoxiques :
Paracétamol : après ingestion de doses massives (>10 g)
cytolyse hépatique : souvent associée à une insuffisance rénale
Champignons (amanita phalloïdes)
Ethanol (hépatite alcoolique aigue)
Autres : solvants organiques
Atteinte vasculaire :
Défaillance circulatoire : toutes les causes de bas débit (notamment états de choc)
peuvent être à l'origine d'une ischémie hépatique aigue par chute du débit
hépatique.
Syndrome de Budd-Chiari : thrombose simultanée des veines et des gros troncs
sus-hépatiques à développement très précoce ascite abondante, insuffisance rénale
sévère.
Syndrome de Reye (chez enfant et adolescent) : stéatose microvésiculaire diffuse.
Origine inconnue mais rôle dans prise Acide acétyl-salicylique établi.
Autres :
Traumatismes hépatiques
Infiltration carcinomateuse diffuse
III COMPLICATIONS
Elles sont liées à l'encéphalopathie avec risque de mort cérébrale, à l'infection,
aux troubles de la coagulation, au syndrome hépato-rénal et aux troubles métaboliques.
Neurologiques :
3 mécanismes invoqués :
Le fois malade libère des substances toxiques pour le cerveau
Le foie malade n'épure plus le sang de certaines substances toxiques pour le cerveau
Ne fabrique plus certaines substances indispensables au fonctionnement cérébral.
3 stades de gravité croissante se succédant rapidement
Surveillé au moyen de la classification de Adams et Folley
. Stade I : lenteur intellectuelle astérixis
. Stade II : confusion, désorientation temporo-spatiale et paliative, somnolence diurne
contrastant avec insomnie nocturne
. Stade III : coma
ð III a : coma léger. Persistance de mouvements spontanés et conservation des réflexes
ostéotendineux.
ð III b : coma plus profond : aucun mouvement spontané. Réflexes ostéotendineux,
cornéens et cutanés plantaires disparaissent. (plus ou moins crises convulsives,
mouvement d'errance des yeux, mâchonnement et/ou hoquet.
Coagulopathie :
La majorité des protéines qui activent ou inhibent la coagulation sont synthétisées
par le foie. Le risque hémorragique est surtout dépendant des troubles plaquettaires. :
thrombopénie, troubles d'adhésivité et d'agrégabilité, CIVD. A l'exception du facteur
VIII, tous les facteurs de coagulation sont abaissés. Le dosage de la prothrombine et du
facteur V sont les tests les plus couramment pratiqués. Les hémorragies prennent
rarement une importance menaçante. En revanche, il est fréquent de noter le caractère
sanglant des aspirations trachéo-bronchiques et/ou du liquide gastrique chez les malades
ventilés et/ou porteurs d'une sonde naso-gastrique.
Infection :
Les causes d'infection sont multiples, liées à l'attente l'atteinte des cellules de
Kuppfer, au déficit des défenses immunitaires, associées à un risque accru de
translocation bactérienne. De plus, les cathétérismes majorent ces risques, de même
que les troubles de déglutition en cas d'encéphalopathie. Les germes en cause sont le
plus souvent le Staphylocoque doré, les streptocoques et les bacilles Gram -. Les
infections à levures sont fréquentes et de pronostic sévère.
Rénales :
L'oligurie, l'insuffisance rénale et la rétention hydrosodée sont les trois anomalies
les plus fréquentes.
Pulmonaires : (principalement hypoventilation)
Elles sont dues d'une part au syndrome hépato-pulmonaire avec constitution de shunts, et
d'autre part à une hypoventilation alvéolaire en cas de troubles de la déglutition. Il
s'en suit une hypoxie qui aggrave l'atteinte neurologique.
En pratique, l'hypoventilation et l'hypoxie doivent être prévenues par une ventilation
artificielle précoce.
Cardio-vasculaires :
Une tachycardie sinusale est habituelle et la pression artérielle est généralement
basse avec un débit cardiaque élevé (abaissement des résistances vasculaires
périphériques)). Le volume sanguin total est diminué. Ces patients sont donc très
sensibles à l'hypovolémie.
Métaboliques (en particulier hypoglycémies) :
Sur le plan pratique, l'administration de glucose doit être continue sans à-coups afin
d'éviter les hypoglycémies réactionnelles sévères.
IV SURVEILLANCE
Le risque d'atteinte neurologique est surveillé cliniquement au moyen de
la classification de Adams et Folley.
La surveillance de l'état hémodynamique et respiratoire fait appel aux techniques
habituelles dont le saturomètre de pouls et la GDS qui permet d'apprécier une hypoxie ou
une alcalose métabolique.
La fonction rénale est surveillée au moyen de la mesure de la clairance de la
créatinine
La surveillance des fonctions hépatiques est essentiellement biologique par le dosage des
ALAT, de la prothrombine et du facteur V. La numération plaquettaire est quotidienne.
V TRAITEMENT
La sévérité d'une hépatite aigue est définie par une diminution du TP
(et plus particulièrement du facteur V) au-dessous de 50 %. Ventilation mécanique
justifiée chez patients comateux. Gestes invasifs doivent être limités au strict
nécessaire compte tenu des risques hémorragiques et infectieux particulièrement
élevés.
Cas particulier : intoxication au paracétamol
Après ingestion de doses massives (> 10 g), on observe une hépatite cytolytique
pouvant conduire à une IHG. L'atteinte hépatique est alors souvent associée à une
insuffisance rénale. Un traitement préventif par N.acéthyl-cystéine est indiqué
(=FLUIMUCIL).
Document rédigé par Anne Laure
Espinasse, Emmanuel Tripard IDE,
Novembre
2000.