La légionellose

 

Epidémiologie

d'après C. Perronne
Service des Maladies Infectieuses et Tropicales – Hôpital Raymond Poincaré – 92380 Garches
e-mail : c.perronne@rpc-ap-hop-paris.fr

Legionella pneumophila est une bactérie de l’environnement présente sur tous les continents, mais dont l’isolement est plus fréquemment rapporté dans les pays industrialisés. En France, 440 cas de légionellose ont été déclarés en 1999, soit une incidence de 0,73 cas pour 100 000 habitants.

On estime cependant qu’en France, en 1998, 1 124 cas de légionellose sont survenus et que seuls 33% des cas avaient été déclarés (5).

Les cas déclarés sont pour la plupart du temps des malades hospitalisés ; ces données ne représentant qu’une fraction des cas réels, car en France 90% des pneumonies acquises hors de l’hôpital sont soignées en ville.

Legionella a été retrouvée dans les eaux douces et les lacs ainsi que dans des sources chaudes, la terre et les composts. Les Legionella vivent à l’état libre dans l’environnement et se multiplient à l’intérieur des cellules, notamment certains protozoaires de type amibes.

A partir de l’environnement, la bactérie peut coloniser des sites artificiels. Les Legionella sont détectées en faible quantité dans l’eau froide et en quantité nettement plus élevée dans l’eau chaude, leur température de multiplication optimale étant entre 25° et 45°C. Elles sont en revanche tuées par une eau très chaude (> 50°C).

Les réseaux de tous les bâtiments (particuliers ou collectifs) peuvent être contaminés. Dans les hôtels et les hôpitaux, les réseaux d’eau chaude sanitaire sont fréquemment colonisés par des Legionella du fait de la taille et de la complexité des réseaux (bras morts, mauvaise circulation de l’eau) et de la température de l’eau chaude souvent plus basse que dans les logements privés (économie d’énergie, prévention des brûlures dans les hôpitaux). Les biofilms dans les canalisations constituent un site de prolifération. Il a été observé des augmentations des concentrations en Legionella après des travaux de plomberie. Dans les portions de réseaux non utilisées où l’eau est stagnante, comme une chambre inoccupée, on observe aussi une augmentation des concentrations en Legionella. Il est maintenant connu que les tours aéroréfrigérantes (dispositifs permettant d’évacuer la chaleur produite par les systèmes de climatisation et installés à l’extérieur des bâtiments) sont fréquemment colonisées par les légionelles à des concentrations importantes.

La contamination des personnes se fait principalement par inhalation d’aérosols contaminés. L’aérosol peut provenir d’une douche, d’un bain à remous ou d’une tour aéroréfrigérante. Les bains à remous ont été à l’origine de 181 cas aux Pays Bas en 1999 et 93 cas en Belgique. Les tours aéroréfrigérantes ont été à l’origine de 20 cas à Paris en 1998, de 8 cas à Paris en 1999 et de 110 cas à Melbourne en 2000. Les aérosols de ces tours peuvent être disséminés à plusieurs dizaines de mètres.

Il n’existe pas de transmission interhumaine de la maladie.

Les infections à Legionella sont rares chez les enfants. Les quelques cas concernent des enfants traités en cancérologie ou en hématologie pour une maladie maligne. Les adultes sains peuvent être concernés. La légionellose est une pneumonie que l’on peut acquérir lors de la vie courante et la moitié des cas sont observés chez des sujets antérieurement sains. Les facteurs majorant le risque sont les bronchopneumopathies chroniques obstructives, l’alcoolisme, le tabagisme, la diminution des défenses immunitaires consécutive à une pathologie ou un traitement, la néoplasie, l’insuffisance rénale sévère. Il faut noter que les malades neutropéniques ou infectés par le VIH ne semblent pas avoir un risque clairement majoré. Les personnes à haut risque sont les immunodéprimés sévères et particulièrement les malades ayant reçu une greffe d’organe ou ayant reçu une corticothérapie prolongée ou récente mais à forte dose.

La légionellose donne habituellement un tableau de pneumonie, les symptômes prédominant étant une forte fièvre avec toux. Cette maladie se soigne avec certains antibiotiques. Les formes sévères nécessitent l’hospitalisation.

La prévention de la légionellose est l’objet de plusieurs mesures de santé publique visant à améliorer la qualité de l’eau dans les établissements publics et à améliorer l’entretien des tours aéro-réfrigérantes des bâtiments climatisés

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Symptomatologie clinique (Ch. Santré, décembre 2001)

Début rapide

Fièvre très élevée (souvent supérieure à 40°C), signes respiratoires (dyspnée, toux)

Pneumopathie extensive (atteinte de plusieurs lobes), pouvant évoluer vers le SDRA, épanchement pleural (environ un tiers des cas), opacités multinodulaires excavées ou non (patients immunodéprimés, corticothérapie),

Signes neurologiques : céphalées, confusion, agitation, coma,

Signes digestifs : douleurs abdominales, diarrhée (20 à 40 % des cas), vomissements

Atteinte musculaire : myalgies, rhabdomyolyse.

Localisations extra-pulmonaires : sinusite, cellulite, pancréatite, péritonite, pyélonéphrite, myocardite, endocardite et/ou médiastinite (nosocomiale).

Diagnostic biologique (Ch. Santré, décembre 2001) :

Polynucléose neutrophile,

Insuffisance rénale aiguë (50 % des cas),

Hyponatrémie,

Atteinte hépatique avec une cytolyse modérée,

Rhabdomyolyse

Diagnostic bactériologique (tableau I) : mise en évidence de Legionella pneumophila dans les prélèvements pulmonaires (ECBT, LBA, liquide pleural), dans les hémocultures par  IFD ou culture,

Mise en évidence de l'antigène dans les urines (L. pneumophila sérogroupe 1),

Sérodiagnostic par IFI (titre supérieur 1:128,  titre X 4),

PCR, n'existe pas encore en routine.

La culture de Legionella sp nécessite des milieux gélosés spécifiques CYE ou BCYE, parfois rendus sélectifs par l'adjonction d'antibiotiques. Le délai de réponse est de plusieurs jours (minimum 2 à 3 jours).

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Legionella pneumophila Immunofluorescence sur Legionella pneumophila

Fig. 1 : Mise en évidence de Legionella pneumophila par coloration, ou par immunofluorescence direct sur prélèvements pulmonaires

  Sensibilité Spécificité
Culture 80 100
IFD sur prélèvement bronchique 33-70 96-99
Antigène urinaire 70 100
Sérologie 40-60 96-99

Tableau I : Valeurs opérationnelles des tests diagnostiques (D'après JE Stout & VL Yu, N Engl J Med, 1997; 337: 682-87)

Traitement (Ch. Santré, décembre 2001)

Les données fondamentales montrent que les antibiotiques les plus actifs sur les Legionella situées à l'intérieur des phagolysosomes macrophagiques sont les macrolides, la rifampicine et les fluoroquinolones.

Le traitement de référence historique est l'érythromycine. En raison d'une mauvaise tolérance, ce traitement a été progressivement abandonnée au profit de macrolides plus récents, dont l'activité in-vitro est supérieure. Les quinolones ont une excellente activité in-vitro et une bonne pénétration intracellulaire et sont volontiers utilisées en première intention dans les formes sévères. La rifampicine est très active in-vitro et a été proposée en association avec une quinolone ou un macrolide, particulièrement chez les patients immunodéprimés. Cependant, en raison d'interactions médicamenteuses, la rifampicine doit être évitée chez les patients recevant des immunosupresseurs.

La durée de traitement est de 10 à 14 jours, mais une durée de 21 jours est recommandée chez les patients immunodéprimés ou en cas de forme grave et de pneumonie extensive.

   
Azithromycine 500 mg per-os ou IV toutes les 24 heures
Clarrithromycine 500 mg per-os ou IV toutes les 12 heures
Roxythromycine 300 mg per-os toutes les 12 heures
Erythromycine 1 g IV toutes les 6 heures ou 500 mg per-os toutes les 6 heures
Levofloxacine 500 mg per-os ou IV toutes les 24 heures
Ciprofloxacine 400 mg IV toutes les 8 heures ou 750 mg per-os toutes les 12 heures
Ofloxacine 400 mg per-os ou IV toutes les 12 heures
Doxycycline 100 mg per-os ou IV toutes les 12 heures
Minocycline 100 mg per-os ou IV toutes les 24 heures
Tétracycline 500 mg per-os ou IV toutes les 6 heures
Triméthoprim-sulfamethoxazole 160 et 800 mg IV toutes les 8 heures
160 et 800 mg per-os toutes les 12 heures
Rifampicine 300 à 600 mg per-os ou IV toutes les 12 heures

Tableau II : Antibiotiques actifs dans le traitement des légionelloses

Prévention

 

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Pour en savoir plus :

Diagnostic et traitement des légionelloses par M. Sirodot (document PDF Ko)
Prise en charge et traitement des pneumopathies communautaires sévères