Les infections invasives à méningocoque

Rédaction : Ch. Santré, mise à jour :janvier 2002.

Épidémiologie
Diagnostic microbiologique
Diagnostic clinique, complications
Traitement

Pour en savoir plus

Épidémiologie

En dehors des épidémies, au moins 1,2 millions de cas de méningite bactérienne se produisent chaque année selon les estimations, dont 135 000 mortels. Environ 500 000 de ces cas et 50 000 de ces décès sont imputables au méningocoque. La méningite méningococcique est la seule forme de méningite bactérienne qui provoque des épidémies. Les plus importantes d'entre elles se déclarent en Afrique subsaharienne, dans les pays de la « zone à méningite » qui s'étend de l'Éthiopie à l'est au Sénégal à l'ouest. Elles se produisent pendant la saison sèche dans cette région. Ce sont principalement les enfants en bas âge qui sont affectés mais, en période d'épidémie, les grands enfants, les adolescents et les jeunes adultes sont également touchés.
Après une flambée locale, une épidémie de grande ampleur peut survenir l'année suivante et les taux d'incidence rester élevés pendant encore un à deux ans supplémentaires, à moins que ne soient instaurées des mesures de lutte adaptées comprenant la vaccination de masse.
Transmission : Elle s'effectue par contact direct, notamment avec les gouttelettes qu'émettent les voies respiratoires des sujets infectés (nez, gorge). La transmission est strictement inter-humaine. La plupart des infections sont infra cliniques et nombreuses sont les personnes contaminées qui deviennent des porteurs asymptomatiques. La diminution de l'immunité dans la population contre une souche particulière favorise les épidémies, de même que le surpeuplement, les conditions météorologiques comme la saison sèche ou une sécheresse prolongée, ou encore des tempêtes de poussière. La présence d'infections des voies respiratoires supérieures peut également favoriser les épidémies.
L'incidence en 2000 en France était estimée à 1,16/100 000 habitants, ce qui est un des chiffres les plus faibles d'Europe. Cette incidence est cependant en augmentation constante depuis 1996 (environ 13 % par an).

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Diagnostic clinique

Période d'incubation : 2 à 10 jours, souvent 3 à 4 jours.
Tableau clinique : La méningite méningococcique se caractérise par l'apparition brutale d'un syndrome méningé. Les signes neurologiques sont les suivants : prostration, léthargie, délire, coma et/ou convulsions. Chez le nourrisson, la maladie n'est pas toujours d'apparition brutale et ne s'accompagne pas forcément d'une raideur de la nuque. La présence d'éléments purpuriques et/ou d'arthralgies est évocatrice de l'étiologie.
Même en cas de diagnostic précoce de la maladie et d'instauration d'un traitement adapté, la mortalité est comprise entre 5 et 10 % et peut dépasser 50 % en l'absence de traitement. Outre la mortalité associée à cette infection, 15 à 20 % de ceux qui survivent souffrent de séquelles neurologiques (surdité ou retard mental).
La bactériémie méningococcique (méningococcémie) est une autre forme, moins fréquente (10 à 30 %) mais plus grave (mortalité de 20 à 40 % en cas de dorme fulminante) de la maladie : elle se caractérise par un collapsus cardio-vasculaire rapide et un purpura rapidement extensif.
Il peut exister d'autres localisations (arthrite, péricardite, infections des voies aériennes supérieures : pneumonie, sinusite)
 

Définition des cas d’infection invasive à méningocoque (selon CSHPF)

Conformément à l’avis du CSHPF du 10 mars 2000, est considéré comme cas d’infection invasive à méningocoque tout cas remplissant l’une au moins des cinq conditions suivantes :
1. Isolement bactériologique de méningocoques à partir d’un site normalement stérile (sang, L.C.R., liquide articulaire, liquide pleural, liquide péricardique) OU à partir d’une lésion cutanée purpurique.
2. Présence de diplocoques gram négatif à l’examen direct du L.C.R.
3. L.C.R. évocateur de méningite bactérienne purulente (à l’exclusion de l’isolement d’une autre bactérie) ET présence d’éléments purpuriques cutanés quel que soit leur type.
4. L.C.R. évocateur de méningite bactérienne purulente (à l’exclusion de l’isolement d’une autre bactérie) ET présence d’antigène soluble méningococcique dans le L.C.R., le sang ou les urines.
5. Présence d’un purpura fulminans (purpura dont les éléments s’étendent rapidement en taille et en nombre, avec au moins un élément nécrotique ou ecchymotique de plus de trois millimètres de diamètre associé à un syndrome infectieux sévère, non attribué à une autre étiologie).

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Complications

Oedème cérébral, hématome sous-dural (enfant), thrombophlébite,
Syndrome de Waterhouse-Friederichsen,
Nécrose des extrémités (amputations de doigts ou de membres),
Paralysies des nerfs crâniens, surdité, déficit moteur, retard psychomoteur.

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Diagnostic microbiologique

Ponction lombaire : le LCR est hypertendu, le plus souvent trouble contenant de 100 à 40 000 leucocytes/mm3 (PNN +++). La protéinorrachie est élevée et la glycorrachie basse. L'examen direct retrouve des diplocoques Gram négatif. La recherche d'antigènes solubles est intéressante en cas d'antibiothérapie antérieure. En France, le sérotype le plus fréquent est le B (55 %), suivi du C (environ 35 %). Les autres sérotypes (A, Y, W 135 & Z) sont plus rares.
Depuis peu, il existe une PCR. L'amplification du gène crgA permet l'identification de N. meningitidis. L'amplification du gène siaD codant pour la biosynthèse de la capsule des sérogroupes B, C et Y/W135 et le gène mynB pour le sérogroupe A permettent la prédiction du sérotype.
Les hémocultures peuvent être positives à N. meningitidis.
La mise en évidence de la bactérie reste fondamentale pour la réalisation de l'antibiogramme

Traitement.

C'est une urgence absolue
Tout purpura fébrile doit être hospitalisé après injection d'une pénicilline

Les antibiotiques actifs sont : la pénicilline G, l'ampicilline, le chloramphénicol, la  ceftriaxone ou le céfotaxime. Le chloramphénicol huileux peut être le médicament de choix là où les moyens sanitaires sont limités, car une seule dose de la préparation à action prolongée est efficace.
En France, des très rares souches présentent une sensibilité légèrement diminuée à la pénicilline. Compte tenu de ces données épidémiologiques, l'amoxicilline (150 mg/kg.j) reste le traitement de référence.
La corticothérapie peut être proposée chez l'enfant dans le but de réduire les séquelles. Dans ce cas, elle est débutée en même temps que l'antibiothérapie à la posologie de  0,6 mg/kg/j de dexaméthasone IV en deux a quatre injections. La durée du traitement est discutée, mais un traitement de 2 jours semble aussi efficace qu'un traitement de 4 jours.
La durée de traitement est de 7 jours. Sauf évolution clinique défavorable, une PL de contrôle à 48 heures est totalement inutile.
Déclaration obligatoire, signalement & notification
Antibiothérapie prophylactique des sujets contacts dans les 10 jours précédents. Le traitement prophylactique recommandé est Rifampicine 600 mg/12 h pendant 48 heures chez l'adulte (10 mg/kg.12 h si enfant de 1 mois à 2 ans, 5 mg/kg .12 h pour les enfants de moins de 1 mois). Il doit être débuté dans les 24 ou 48 heures suivant le diagnostic et n'a plus d'intérêt au-delà de 10 jours.
Les bétalactamines, autres que les céphalosporines de 3ème génération ne suppriment pas le portage rhino-pharyngé. Avant sa sortie, le patient reçoit un traitement par rifampicine 600 mg/12 h pendant 48 h ou par spiramycine pendant 5 jours.
Les membres du personnel soignant ne reçoivent pas de chimioprophylaxie, à l'exclusion éventuelle du médecin ayant réalisé l'intubation sans masque de protection.
Vaccination si méningocoque C ou A. Deux types de vaccins de nature polysaccharidique, sont disponibles actuellement en France :
Le vaccin antiméningococcique A+C,
Le vaccin tétravalent A/C/Y/W135 qui est disponible dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) de cohorte (circulaire DGS/SD5C/2001/543 du 9 novembre 2001).
Traitement du purpura fulminans :
Antibiothérapie IV ou IM dès la suspicion clinique : ceftriaxone (1 à 2 g chez l'adulte, 50 à 100 mg/kg chez le nourrisson ou l'enfant), céfotaxime (1 g chez l'adulte, 50 mg/kg chez le nourrisson ou l'enfant), à défaut amoxicilline (1 g chez l'adulte, 25 à 50 mg/kg chez le nourrisson ou l'enfant, dose à renouveler 2 h après).
Traitement du choc septique
Traitement substitutif de la CIVD et des défaillances viscérales par la Protéine C, Protéine C activée (dotrecogine alpha), l'antithrombine III (recommandations européennes, non validées actuellement par des études comparatives).
La protéine BPI recombinante et l'inhibatieur du facteur tissulaire sont en cours d'évaluation.

 

Schéma de la chimioprophylaxie :

Elle doit être administrée dans les plus brefs délais, autant que possible dans les 24heures à 48 heures après le diagnostic et en tout état de cause, au plus tard dans les 10 jours après le dernier contact avec le cas.
Rifampicine
par voie orale, pendant 2 jours à la dose suivante :
Adulte : 600 mg, 2 fois par jour,
Nourrisson et enfant (1 mois à 15 ans) : 10 mg/kg, 2 fois par jour
Nouveau-né (moins de 1 mois) : 5 mg/kg, 2 fois par jour

Ce médicament ne doit jamais être utilisé dans les cas suivants : hypersensibilité à l’un de ses composants et aux rifamycines, porphyries, associations avec des médicaments (delavirdine) et association avec les antiprotéases. Ce médicament ne doit généralement pas être utilisé en association avec les contraceptifs, oestroprogestatifs et progestatifs, et la nevirapine.
Il est important de prévenir toute jeune fille ou femme en âge de procréer de la diminution de l’efficacité des contraceptifs oraux en cas de prise de se médicament et de la nécessité d’utiliser une contraception de type mécaniqu
e.
La rifampicine modifie la pharmacocinétique de nombreux médicaments.

Effets secondaires
: la rifampicine peut entraîner une coloration rouge des sécrétions et colorer de façon permanente des lentilles de contacts souples.
Grossesse
: l’utilisation de la rifampicine ne doit être envisagée au cours de la grossesse qu’en l’absence d’alternative thérapeutique.
En cas de contre-indication à la rifampicine :

Spiramycine
par voie orale, pendant 5 jours à la dose suivante

Adulte : 3 millions d’U.I., 2 fois par jour
Nourrisson et enfant : 75 000 U.I./kg, 2 fois par jour.
Contre-indications : allergie à la spiramycine

NB : Dans la mesure où le résumé des caractéristiques du produit est susceptible d’évoluer, il appartient au médecin prescripteur de s’assurer du respect des caractéristiques du produit en vigueur au moment de la prescription.

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Pour en savoir plus :

La page du site de l'OMS sur la méningite méningococcique
Conduite à tenir devant une suspicion de méningite chez l'adulte (perfectionnement en réanimation par J.F. Timsit)
Circulaire DGS 2002 sur la prophylaxie des infections à méningocoque
Conférence de consensus sur les méningites purulentes communautaires (Saint-Etienne, février 1996)

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